BALLET / Glanage d’écrits / L. Angot – A. Vasseux


  • BALLET  / Par ceux qui l’ont vu
  • « L’impression immédiate d’une filiation avec les burlesques, Keaton, Langdon, un mélange de drôlerie et d’angoisse qui passe autant dans le corps, virtuose et élastique, que sur le visage, enfantin et ultra expressif. Le rapport, symbolique mais très concret, avec le « tube » de tissus, mobile onirique sur lequel on peut projeter ce qu’on veut (le monde, le manque, l’autre, l’intériorité…), suscite autant l’émerveillement que le questionnement et le rire. Ce que j’ai vu est aussi authentiquement comique qu’étonnamment existentiel, avec une puissance d’évocation rare… » 

    Arthur Harari

  •  «Laetitia Angot – sans pareille, c’était une heure sans pareille. Absolue fascination d’un bout à l’autre, traversée un peu là de quelques très bons grands rires et ici d’un effroi véritable. Je songeais alors au chef-d’oeuvre colossal de George Didi-Huberman, « L’image survivante — Histoire de l’art et temps des fantômes selon Aby Warburg », Warburg qui s’évertua à une science phénoménale, une science des images, dont il tira quelques fous et primordiaux concepts dont le Nachleben, la sur-vie des images et la Pathosformel, la plus haute appellation de ce qu’est l’expression peut-être, enfin, les formules corporelles relatives aux mouvements intérieurs, prodigieux sujet d’étude… C’est à rendre fou, ça jette une telle ardeur dans la vie. Voyant Ballet je re-cheminais passionnément vers ce drôle de petit chapitre « Chorégraphie des intensités : la nymphe, le désir, le débat ». Laetitia Angot a de ces « formules » si parfaitement envoûtantes et précisément parlantes, lentes, à ce point expressives, son dos s’éloignant en ondes, baigné de suées qui font de sa chemise une eau lourde mutante — chose superbe que de voir, dans son dos, se produire cette sorte d’inimaginable et substancielle forme, et, qu’en aveugle, avec une matière si indéterminable que la peau ensuquée, elle nous fasse prendre si fort conscience de ce qu’est un mouvement. Puis il y a cette autre eau, ce fourreau tangent d’eau et de lumière, la sculpture d’Arnaud Vasseux, dont la constance et l’écoulement paisibles, le long cours presque imperturbable se joue de la pantomime fracturée de la danseuse, dont le souffle désarticulé témoigne des nombreux allers-et-retours entre présent et profondeurs. On assiste ainsi à un vaste débat d’images, de langues, de signes, de visions, au fur et à mesure que Laetitia Angot éprouve la montée en elle d’un « nombre considérable d’incarnations, de personnages possibles » et simultanément du « plus intime ».» 

    Héloïse Pierre-Emmanuel

  •  « La relation qui s’établit entre la prestation de Laetitia Angot et la sculpture d’Arnaud Vasseux relève du dialogue, tant sonore que spatial. Les corps, tourmentés, électriques, font naître entre eux un champ de tension que les déplacements de L.A. d’une part, et le tournoiement du mobile d’autre part, font respirer. Proches ou éloignés, les deux intervenants se rappellent l’un à l’autre comme si le champ, devenu magnétique, les attirait et les repoussait alternativement. La vitesse de rotation du mobile fait écho aux variations d’intensité de L.A. ; l’ondulation produite s’enrichit des variations de lumière dont la pureté blanche met en valeur la conversation spatiale. Deux corps se cherchent, se parlent, s’apprivoisent, s’enroulent. Les limites entre le vivant et l’inanimé se brouillent, l’objet prend vie, le corps pénètre la matière et on ne sait plus si les « cris-sements » sont électriques, plastiques ou organiques. »Adrien Zask
  •  « C’est un espace nu où se dresse à main gauche une sorte de mobile. Qui bientôt se met à tourner sur lui-même. Un dispositif très simple, bruissant, imparfaitement translucide, comme une lanterne magique géante, et fluide, et qui ne projette rien (on s’y projette tout de suite). Puis à main droite un corps se lève et soudain fait irruption pour danser, jouer et donner à sentir un étonnant ballet autour, avec et contre cette machinerie fantomatique. Ce qu’on voit se déployer par la suite, c’est une figure improbable où coexistent un corps fictif, presque un personnage (bigarré de possibilités burlesques, butô, parodiques, dansées…), une performance où le corps de l’interprète est engagé au présent (une jeune femme qui lutte avec sa matière et son devenir) et, au point de convergence entre les deux, une tentative articulée pour nous donner à éprouver une modalité de rapport possible entre un corps et cette figure attirante, vertigineuse, projective qui impassiblement déploie son dispositif à ses côtés. Le corps de l’interprète devient alors l’espace de projection pour tout ce qui pourrait traverser un corps humain dans sa confrontation avec une œuvre de l’art, ou tout objet physique du monde pensé pour produire sur nous un effet – tout objet, en vérité, vers lequel nous nous sentons attirés par un vertige. Au singulier, parce que c’est à elle, sur scène, que ça arrive. Mais aussi au pluriel parce que c’est à nous que c’est donné, dans un effort de composition et d’abandon joué dans le risque du présent. On a le sentiment, au bout du compte, que cet impressionnant déploiement, ce défilé des fantômes du désir de faire corps avec l’objet, se heurte à un impossible. Ça a eu lieu, ce « faire corps avec », presque, peut-être, à un moment (lequel ?), puis ça s’est évanoui. C’est fini. Il faudra encore se faire violence et tenter de le refaire. C’est le plus déchirant. » 

    Vincent Poymiro

  • « Quand je suis entrée le Ballet était déjà commencé alors qu’à l’entrée, on m’avait juré que pas encore! Laetitia était pourtant déjà bien là dans un état « tumultueux ». Elle, pas enfermée dans une bulle mais imitant cette bulle à la peau transparente opaque, à côté semblait bien plus poreuse, consciente, lucide, translucide. J’y ai vu une sorte de transe, et à la fois, quelque chose comme un jeu très savant et très exact avec la distance entre elle et nous. Un jeu avec le présent d’une athlète affective qui absorbe et renvoie sans arrêt ce regard. Ne le digère pas, ne s’y enferme pas et n’a de cesse de renvoyer à la distance qui nous sépare tous les uns des autres. J’y ai vu quelqu’une qui s’amuse avec toute sorte d’ambivalences: celles entre le clown et la danseuse, l’exhibition et l’inhibition, la suffisance et l’insatisfaction. Entre seuls ensemble et tous devant cette solitude, nous étions spectateurs de ce Ballet qui faisait danser les idées, les mots, les impulsions, le visage, le rien, nous regardant la regarder avec beaucoup d’humour et une capacité incroyable à inventer avec rien, à se montrer complètement, à se transformer sans cesse, à nous laisser deviner, délirer, venir vers elle, croire que…et puis elle avait disparu et dans le noir, je me suis dit que c’était fini. »Isabelle Catalan
  • « Impressions…Tout d’abord une silhouette menue, fragile, le dos tourné à une sculpture souple qui prend toute la place. Peu à peu le corps de la danseuse se met à vibrer, à vivre ; ses mouvements s’amplifient et s’accélèrent, comme en réponse au mouvement du cylindre…et le dialogue s’engage, nous faisant passer du malaise au rire. Un corps en souffrance, morcelé, indépendant, se transforme sous nos yeux pour devenir une incarnation burlesque puis, de nouveau, être la proie de pulsions que la danseuse laisse affleurer devant la sculpture indifférente qui continue de tourner inlassablement. Laquelle des deux représentations est la plus vivante ? Laquelle des deux met le spectateur en face de son propre questionnement ? Restent les images de ce duo qui efface les frontières de nos certitudes, de ces corps animés / inanimés qui incarnent nos sensations, l’image de ce vocabulaire qui nous est proposé pour une nouvelle approche du monde avec nos faiblesses et nos forces, dans l’énergie de l’espoir. »Jocelyne Levy
  • « Un théâtre instantané, rituel du geste oral, qui s’avoue au monde et dans le même temps s’écrit. Corps trajectoire et fragments qui nous guident vers la mise au nu des sens du silence.Laetitia Angot nous parle de nos monologues internes et silencieux, ceux que l’on n’ose jamais dire et qui pourtant construisent inlassablement nos vies tels des architectes secrets. Elle écrit la présence de l’être avec son corps et s’engouffre dans le tournoiement du monde pour se frayer un chemin vers la parole, très rare. Une sculpture comme un corps caverneux, telle une matrice rythmique énigmatique, entre en résonance et en énergie avec l’actrice danseuse. Éclatement des limites du corps, de la scène, éclats de vie, éclats de danse, les mots jaillissent en une partition corporale écrite avec le public, émergence de l’amour urgent. » 

    Jean-michel Susini

  •  « Au bord du miroir – Les petits fantômes perdus – Je bataille » Mathilde Poymiro
BALLET version 2/4 au Granit http://vimeo.com/35414599 / Mot de passe : BALLET version 1/4 Péniche Antipode http://vimeo.com/31301735 / VIDEO LAB.

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